
Dre Sarah Funnell
En mai, la Faculté de médecine de l’Université d’Ottawa a nommé la Dre Sarah Funnell directrice fondatrice du Centre de recherche et d’éducation en santé autochtone (CRESA). Elle a également été nommée professeure adjointe au DMF. La Dre Funnell est une médecin de famille Anishnaabekwe et Tuscaroran, et une spécialiste de la santé publique. Depuis mars 2020, elle se consacre à appuyer les efforts déployés pour répondre à la COVID-19 à titre de médecin-hygiéniste adjointe de Santé publique Ottawa et à faire avancer l’éducation médicale en santé autochtone. Avant cela, elle offrait des services de soins primaires aux peuples autochtones, aux réfugiés, aux immigrants et aux sans-abri. Cette semaine, j’ai eu le plaisir de m’entretenir avec la Dre Funnell et d’en apprendre davantage sur ce qui l’a amenée à faire carrière en médecine et à mieux comprendre les défis auxquels sont confrontés les peuples autochtones pour accéder aux services de soins de santé. Bien que la Dre Funnell soit issue d’une lignée familiale pratiquant la médecine traditionnelle des Premières Nations (privilégiant une approche holistique de la guérison), son statut de mère et sa sensibilisation croissante à la justice sociale au Canada ont ravivé son intérêt à poursuivre une carrière en médecine. Elle a donc décidé de satisfaire son double intérêt pour la médecine familiale et l’épidémiologie en suivant le programme de résidence de cinq ans en santé publique et en médecine préventive. En 2015, elle a reçu son Certificat du Collège des médecins de famille du Canada (CCMF) et en 2018, elle est devenue Associée du Collège royal des médecins et chirurgiens du Canada (FRCPC).
Historiquement, l’éducation médicale se concentre sur les déficits de santé des populations autochtones, telles que le suicide, la toxicomanie, l’itinérance et les maladies chroniques. Toutefois, dans le contexte de la recherche en santé autochtone, cette approche contribue souvent aux stéréotypes et à une marginalisation accrue des Premières Nations, des Inuits et des Métis. La Dre Funnell souligne que la cause profonde de l’iniquité en matière de santé des Autochtones est le racisme, le colonialisme, le pouvoir et le contrôle sur les Autochtones et leurs terres. Les obstacles les plus importants auxquels les peuples autochtones sont confrontés lorsqu’ils veulent accéder aux services de soins de santé sont le racisme physique, technologique et systémique. Les peuples autochtones qui ne résident pas dans une zone urbaine ne peuvent pas se rendre chez un fournisseur de soins de santé en raison de leur situation géographique. La technologie a été une bouée de sauvetage pour bon nombre de personnes pendant cette pandémie, mais pour les communautés autochtones isolées, il existe un fossé numérique. Plusieurs n’ont pas d’ordinateur ou d’accès à un réseau Internet fiable. Ces communautés ont donc encore plus de difficultés à accéder aux soins de santé. Ce manque d’accès à la technologie peut donc constituer un obstacle supplémentaire pour les populations autochtones. En raison du racisme systémique, certains refusent de se faire soigner à cause d’une expérience traumatisante ou parce qu’ils connaissent un membre de leur famille qui a eu une mauvaise expérience dans le passé. Pour certains, les préjudices causés par l’expérience du racisme peuvent être pires que le problème médical. La Dre Funnell affirme qu’il essentiel d’acquérir une compréhension approfondie des déterminants sociaux en dehors du système de santé, notamment les systèmes éducatif et judiciaire et les services sociaux et de protection de l’enfance, pour éradiquer le racisme systémique.
La vision de la Dre Funnell pour le CRESA est d’établir des approches collaboratives en matière de recherche et d’éducation avec les communautés et organisations autochtones de la région. Le CRESA permettra à ces communautés d’étudier ce qui est important pour eux et de s’appuyer sur la richesse de l’histoire, des traditions et des cérémonies des peuples autochtones. Selon la Dre Funnell, la communauté médicale doit cesser d’adopter une approche paternaliste et reconnaître la vision autochtone de la guérison et de la santé. La guérison ne consiste pas seulement à soigner la maladie, mais à adopter une approche axée sur le patient et à comprendre ce que la guérison signifie pour lui. Après avoir été formée à la médecine moderne, la Dre Funnell est revenue à ses racines et a adopté la médecine traditionnelle des Premières Nations. Elle fait remarquer que les modes de vie traditionnels des peuples autochtones leur permettaient de rester en bonne santé. Les méthodes traditionnelles de chasse et de cueillette ne sont pas seulement un moyen de subsistance; l’expérience d’être dans la nature et de prendre conscience de ce qui nous entoure a en soi un effet positif sur l’esprit, le corps et l’âme. Pour la Dre Funnell, c’est la raison pour laquelle la santé publique, la médecine familiale et la santé autochtone sont intrinsèquement liées.