Mes premiers pas en Afrique

Publié le vendredi 18 janvier 2019

Par : Raphaël Rivière

The mass of people awaiting our rural primary care clinic in Benin; the line-ups would sometimes start before dawn.

La masse de gens qui attendaient notre clinique de soins primaires en milieu rural; les files d’attente commençaient parfois avant l’aube.

Je m’appelle Raphaël Rivière. Je suis étudiant en quatrième année de médecine à l’Université d’Ottawa et je suis le lauréat 2018 de la Bourse de voyage en santé mondiale du DMF. J’ai récemment fait une campagne de santé mondiale d’un mois au Bénin, un pays francophone d’Afrique de l’Ouest. J’ai effectué un stage de deux semaines dans deux hôpitaux urbains de la capitale, Cotonou, et j’ai passé une semaine dans un village éloigné avec une grande équipe médicale, et une semaine supplémentaire dans un hôpital de banlieue à Zinvié, fondé par des missionnaires privés. J’ai passé la majeure partie de mon temps en anesthésiologie, en soins intensifs et en médecine d’urgence.

Dans l’ensemble, je suis très heureux d’être allé au Bénin. J’ai beaucoup appris sur l’écart entre notre système de santé, notre culture et l’épidémiologie des maladies. Cela m’a rempli de reconnaissance à l’égard de ce que nous avons en place : notre système n’est peut-être pas parfait, mais il vaut la peine de le préserver et de l’améliorer. Au Bénin, la plupart des patients paient pour tout, y compris la seringue et l’aiguille utilisées pour administrer leurs médicaments. Ici, au Canada, ce n’est certainement pas le cas, et je n’ai pas l’impression que nous (fournisseurs de soins de santé et bénéficiaires) apprécions pleinement les bienfaits de la médecine sociale. Cela m’a donné un nouvel optimisme quant au chemin que nous avons parcouru et à ce que nous pouvons accomplir de plus.

Pendant ma troisième semaine, nous sommes allés à Colli, un village situé à 20 minutes en voiture d’Allada. Nous avons mis sur pied notre propre clinique avec l’équipement limité dont nous disposions. Nous avons offert des consultations à plus de 1 000 patients au cours des cinq jours. Il était gratifiant de pouvoir diagnostiquer le paludisme chez tant d’enfants et de les traiter. Parmi les autres plaintes courantes, mentionnons l’arthrose, les parasites, les ITS, la « fatigue sexuelle », les hémorragies et les cataractes. Dans l’ensemble, compte tenu de nos ressources limitées et de nos patients parfois très malades, toute l’expérience a certainement comporté beaucoup de dilemmes éthiques et de décisions difficiles. Souvent, il fallait se fier à l’instinct clinique. Nous n’avions aucun laboratoire ni ne pouvions effectuer aucun examen radiologique pour corroborer nos impressions cliniques. Nous avions des algorithmes que nous pouvions suivre pour traiter les plaintes courantes, mais nous avions toujours l’impression que nous pouvions faire plus. En réalité, les circonstances étaient très différentes. L’infrastructure nécessaire pour fournir les soins complets que nous avons dans l’Ouest n’était tout simplement pas accessible. Pour beaucoup d’entre eux, c’était comme si nous étions un dispensaire de médicaments et que c’était leur occasion d’en obtenir à moindre coût. Nous étions heureux de fournir les médicaments, en particulier aux enfants, aux femmes enceintes et aux personnes âgées. Nous savions que nous pouvions leur offrir une aide concrète en traitant leur paludisme, en leur fournissant des médicaments prénataux ou en soulageant la douleur causée par l’arthrose. C’était plus de soins que beaucoup de ces gens ne pouvaient se permettre. C’était le mieux que nous pouvions faire avec les délais dont nous disposions compte tenu de la portée du projet. Il était difficile de savoir que certains de ces patients avaient des cataractes ou d’autres maladies qui nécessitaient une intervention chirurgicale le plus tôt possible.

En ce qui concerne les compétences techniques, grâce à mes stages à l’unité de soins intensifs et en anesthésie, j’ai eu la chance d’effectuer des perfusions intraveineuses ainsi que de l’anesthésie neuraxiale. On m’a offert le privilège de nommer le bébé d’une mère accouchant par césarienne à qui j’avais administré une anesthésie rachidienne. A Cotonou, j’ai eu la chance de réanimer un nouveau-né de 30 semaines, né d’une mère souffrant d’éclampsie. Ce fut une expérience formidable pour moi de pouvoir mettre en pratique ce que j’ai appris au cours de ma formation en SARN offerte par un de mes mentors, la Dre Patricia Moussette, anesthésiste en médecine familiale à Winchester.

Raphaël Rivière (second from left), who is this year's recipient of the DFM Global Health Travel Bursary. Along with three other medical students, a paediatrics resident, two nurses and three DFM physicians from the Montfort Hospital

Raphaël (deuxième à partir de la gauche), avec trois autres étudiants en médecine et un résident en pédiatrie qui sont également allés au Bénin.

Mon voyage au Bénin m’a également ouvert un monde nouveau : L’Afrique. J’ai toujours été curieux de connaitre ce continent, et même si je n’ai visité qu’un seul pays et que je ne peux certainement prétendre connaitre tout le continent, cela m’a ouvert une porte pour l’explorer, tant du point de vue culturel que du point de vue des systèmes de santé. Nous pouvons faire tellement plus pour les soins de santé. Outre les énormes lacunes en matière d’infrastructure et de financement pour la création d’établissements de soins de santé de pointe, les éléments fondamentaux, comme le personnel qualifié, sont également absents. Il m’est arrivé à maintes reprises de voir du personnel doté d’un équipement adéquat, mais qui ne savait pas comment l’utiliser. L’inverse est également vrai. On peut alors supposer que ces mêmes personnes perdront probablement leurs compétences techniques au fil du temps, même si elles ont reçu une formation préalable, si elles continuent d’exercer leur métier dans un milieu où elles sont incapables de mettre en pratique ces compétences. Des choses très élémentaires comme les oxymètres, les brassards de tension artérielle, les sondes de température propre et les autocollants d’électrode pour les ECG étaient rares, même dans les contextes de soins actifs. De nombreuses interventions liées aux ressources pourraient changer considérablement les choses à très peu de frais. De toute évidence, je ne suis pas le premier à l’avoir signalé, mais le fait de l’avoir constaté m’a permis de mieux comprendre l’ampleur de l’écart, et à quel point de modestes contributions pouvaient grandement aider. Je réfléchis activement maintenant à la façon dont je pourrais adapter ma carrière pour avoir une incidence sur les systèmes de santé dans les milieux pauvres en ressources. Nous avons beaucoup de choses à faire pour aider les gens, tant au pays qu’à l’étranger, et cette expérience m’a aidé à le reconnaître avec plus de clarté que jamais.

La Bourse de voyage en santé mondiale du DMF aide les apprenants de l’Université d’Ottawa à participer aux initiatives de santé mondiale. La date limite pour poser une candidature est le 31 mars. Envisagez de faire un don au fonds et d’aider les futurs apprenants à faire des voyages qui changeront leur vie comme Raphaël.

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